Editorial des mois de Juillet, Aout et Septembre 2023

« L’œuvre de la justice sera la paix » (Ésaïe 32,17)

Cette année, l’un des trois sujets du bac de philosophie, en filière générale, était :
« Vouloir la paix, est-ce vouloir la justice ? ». En ces temps si perturbés et si pleins de doutes, alors que la guerre fait rage à l’est de notre Europe, je regrette beaucoup que nous n’ayons pas accès aux copies car il serait si intéressant de savoir ce que les jeunes ont à nous dire sur la paix et la justice !

Au-delà de ce regret, j’ai été frappé que ce sujet de bac philo … fasse appel à deux mots qui nous sont si familiers à nous, chrétiens. Cela m’a donné envie d’aller voir ce que nous disent les Écritures de la paix et de la justice !

Dans la Bible, il est parfois difficile, sinon impossible de distinguer entre les nombreux textes qui parlent de la paix, ceux où il est question de la paix de Dieu, ou avec Dieu, et ceux qui parlent de paix avec les êtres humains ou entre les êtres humains. Les textes bibliques ne séparent pas la paix intérieure ou spirituelle et l’extérieure : celle-ci est signe de celle- là et la première annonce et conditionne la seconde. Ce qui est sûr, c’est que théologiquement la paix est don de Dieu (Rappelons-nous la bénédiction de Nombres 6 : « Que le Seigneur lève sa face vers toi et te donne la paix ! » ou le Psaume 29,11 : « Le Seigneur bénira son peuple par la paix.»). La paix est le plus souvent liée à la grâce par laquelle Dieu établit ou rétablit son alliance. Synonyme de réconciliation, la paix est aussi parfois synonyme de tranquillité et de repos par opposition à l’état de guerre entre les individus ou les peuples. Les êtres humains ont à la rechercher, à la demander, à la « faire » (Mt 5,9 ; Mc 9,51 ; 2 Cor 13,11, etc.). C’est donc par cette double acception du mot paix que l’on peut comprendre la plupart des textes où il figure.

Ce qui est important également, c’est que l’annonce et la proclamation de la paix s’accompagnent de l’énoncé de ses conditions dont la principale est l’observation et l’accomplissement de la justice de Dieu ; pas de paix sans justice … Etonnants échos aux termes du sujet du bac de philo de cette année !

Chose étrange, il est assez rarement question de paix dans les évangiles. Si la septième béatitude appelle « fils de Dieu » les « artisans de paix » (Mt 5,9), il est certain que Jésus n’apporte ni ne promet à ses disciples la paix selon le monde. Il déclare lui-même qu’il n’est pas venu « apporter la paix sur la terre, mais la division » (Mt 10, 34). Il lève ainsi toute équivoque quant à son rôle messianique : la paix qu’il donne, c’est la sienne, c’est-à-dire celle dont il est l’auteur et le médiateur (Jean 14,27 : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. »). Elle n’est pas le résultat des entreprises ou des tractations humaines, mais elle se reçoit dans la foi par le Saint-Esprit (Jn 20,19 : « Que la paix soit avec vous ! »).

C’est cette paix reçue dans la foi qui constitue le message que les apôtres vont avoir à proclamer non pas comme un idéal mais comme une réalité donnée, accomplie en lui et par lui. Comme l’amour entre les êtres humains est fondé sur l’amour que Dieu a pour eux en Jésus-Christ, la paix entre les êtres humains est fondée sur la paix que Dieu leur accorde en Jésus-Christ.

La prédication apostolique consiste alors à « annoncer l’évangile de la paix par Jésus Christ qui est notre seigneur à tous » déclare Pierre (Ac 10,36) et la salutation qui ouvre la plupart des épîtres « La grâce et la paix vous sont données de la part de Dieu notre Père et de notre Seigneur Jésus-Christ », n’est pas une clause de style !

C’est l’affirmation que maintenant, en Jésus-Christ, la paix est accor- dée par Dieu à tous les êtres hu- mains et qu’ils sont appelés à vivre cette paix. C’est pourquoi la prédi- cation de l’Évangile de paix com- porte aussi l’exhortation à « vivre en paix », et à « être en paix », « à rechercher la paix avec tous » (Rm 12,18).

Alors, l’enseignement de l’Écriture permet-il de définir l’attitude chrétienne à l’égard de la guerre et de la paix ?

En nous en tenant à ce qui est écrit, il faut retenir deux constatations :

  • D’une part, l’avènement de la paix universelle est lié à l’avènement du Seigneur et à la manifestation de l’unité de son Église. Les guerres jusqu’à la fin des temps resteront l’un des signes du monde de la chute.
  • D’autre part, ce monde est celui où, déjà maintenant, Jésus-Christ est venu « réconcilier toutes choses » et manifester sa victoire sur le péché et la mort. Vivre dans cette espérance et cette foi engage donc l’Église et les chrétiens à manifester sans cesse, dans ce domaine comme dans tous les autres, la réalité de la rédemption accomplie et du règne à venir.

Chers amis, je vous souhaite un bel été dans la joie, dans la justice et dans la paix de Dieu !

Alain Mahaud

 

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